America[s] de Ludovic Manchette & Christian Niemiec

Sur la route 66...
Philadelphie, juillet 1973. Voilà un an qu'Amy est sans nouvelles de sa grande soeur partie tenter sa chance au Manoir Playboy, à Los Angeles. Inquiète, la jeune adolescente décide de la rejoindre. Pour cela, il lui faudra traverser les États-Unis. Seule.
Dans une Amérique de la contre-culture secouée par le scandale du Watergate et traumatisée par la guerre du Viêtnam, sa route sera longue, semée d'imprévus, de belles rencontres et d'individus singuliers : vétéran, couple en cavale, hippies de la dernière heure...

Après avoir beaucoup aimé Alabama 1963, j'avais très envie de retrouver la plume du duo Manchette/Niemiec, et c'est sans même lire le résumé que j'ai acheté et commencé ce bouquin !

Après l'enquête policière et le sud des États-Unis dans les années 60, cette fois, on plonge au coeur des années 70, avec un road trip traversant les US d'est en ouest, aux côtés d'Amy, une très jeune fille bien décidée à aller retrouver sa sœur vivant désormais à l'autre bout du pays. C'est un voyage complètement fou qu'elle va vivre, compte tenu de son (très) jeune âge, tant au niveau des kilomètres parcourus que des rencontres qu'elle va faire.

Si j'avais été scotchée par la plume des auteurs dans leur précédent roman, cette fois ci, l'essai est transformé, et c'est avec un joli brin de nostalgie que plusieurs fois au cours de ma lecture, j'ai vu en Amy une cousine de ce cher Holden Caulfield (héros du Catcher in the rye de J.D Salinger, roman que j'ai lu en VO en cours d'anglais quand j'étais en première il y a ... bien trop longtemps, un héros qui ne m'a jamais quittée, que je rêve de relire, mais j'ai tellement peur de gâcher ma relecture avec mon regard d'adulte que je préfère m'abstenir, même si ça me démange vraiment). Bref, à travers la gouaille de cette gamine déjà marquée par la vie, on découvre une Amérique prise entre deux époques, des personnages assez charismatiques, sur une bande son qui m'a ravie au plus haut point, ainsi que de très nombreuses références à la (pop) culture américaine.

On retrouve dans ce roman un procédé qui m'a immanquablement fait penser à Forrest Gump, puisqu'Amy côtoie à plusieurs reprises des personnalités réelles en plus de personnages fictifs. Ce mélange entre réalité et fiction peut déconcerter certains lecteurs, mais j'ai trouvé ça plutôt amusant, et surtout, quand j'ai découvert la bande de musiciens, j'étais sur un petit nuage tant j'aime cet artiste (accompagné de ses musiciens), et j'entendais tellement sa voix (au passage, son spectacle sur Netflix est à ne pas rater !) que ça a amplifié mon expérience de lectrice.

Certaines rencontres m'ont marquée plus que d'autres, et je confesse avoir été prise par l'émotion à quelques reprises (notamment la scène finale). Amy est une jeune fille touchante, elle a un sens de la débrouillardise assez dingue, doublée d'une inconscience carrément folle. Aussi cliché que cela puisse être de le dire, elle est sacrément mature et futée pour son âge !

Au-delà du simple récit et du déroulé des évènements racontés, la force de la littérature, pour moi, c'est l'expérience que nous vivons en tant que lecteur, les échos que cela éveille en nous et qui rendent tellement unique et personnel l'acte de lire, justement. Ici, c'est un roman qui m'a évoqué tellement de souvenirs liés à l'ambiance musicale évoquée (j'ai grandi avec des parents fans de rock des 70's), à ce souvenir d'un personnage cher, d'un film aimé, d'un artiste adoré que cela a magnifié ma lecture et en a fait un moment à part.

Un très beau moment de lecture donc, avec ce roman que je verrais tellement bien être adapté en film !

/5