Chanson douce de Leila Slimani

Lorsque Myriam, mère de deux jeunes enfants, décide malgré les réticences de son mari de reprendre son activité au sein d'un cabinet d'avocats, le couple se met à la recherche d'une nounou. Après un casting sévère, ils engagent Louise, qui conquiert très vite l'affection des enfants et occupe progressivement une place centrale dans le foyer. Peu à peu le piège de la dépendance mutuelle va se refermer, jusqu'au drame. A travers la description précise du jeune couple et celle du personnage fascinant et mystérieux de la nounou, c'est notre époque qui se révèle, avec sa conception de l'amour et de l'éducation, des rapports de domination et d'argent, des préjugés de classe ou de culture.

Je viens de refermer ce roman et j'en sors toute chamboulée. Quel talent de la part de l'auteur !

Leila Slimani nous entraîne dans le quotidien d'une famille parisienne, où la nounou va prendre de plus en plus de place au fur et à mesure, jusqu'à ce qu'un drame terrible arrive. Ce drame, on le connait dès la première page, on est confronté à l'horreur de ce que Louise a fait à ces enfants dès le début, et tout l'intérêt du livre est de comprendre comment la nounou a pu en arriver là. A peine avais-je lu les premières lignes que j'ai été tout de suite happée par le récit. Et ensuite, impossible de lâcher ce roman avant la fin.

C'est un livre au voyeurisme malsain, qui nous plonge dans la vie tranquille de Myriam, Paul, Mila et Adam, et de leur nounou Louise. Louise qui est un personnage qu'on déteste au premier abord, vu ce qu'on sait, mais qui n'est pas tout blanc ou tout noir. Rien ne peut excuser son geste, bien sûr, mais pendant toute notre lecture on essaye de comprendre, on apprend à la connaître, on compatit, on éprouve de l'horreur à son propos. On attend le drame, on a peur qu'il advienne, même si on le sait inévitable.  

Et pourtant il ne se passe pas grand chose pendant ces 226 pages. Seulement le défilement des jours, l'immersion de plus en plus intime dans cette famille. Leurs réactions, leurs doutes, leur confiance. Et il n'y a pas besoin de plus. Leila Slimani mène son récit avec brio, et je comprends pourquoi ce roman a gagné le prix Goncourt. La tension est omniprésente, palpable et pourtant invisible. C'est extrêmement bien mené.

J'ai été confrontée à de nombreuses émotions à la lecture de ce roman, qui m'a fait réfléchir plus d'une fois. Il nous renvoie étrangement à notre propre condition, et c'est d'après moi la force de cette histoire.

,5/5.